Ingrid a mis a profit les confinements pour apprendre à attacher. Faute de modèle, elle s’est exercée un mannequin en mousse. A présent, il était temps de sauter »dans le grand bain » et d’attacher de vraies personnes dans de vraies soirées.
Attacher à deux
Nous avons eu l’occasion de faire l’animation shibari de la soirée « venez vivre l’été indien » en septembre. Nous avons commencé par une démonstration dans laquelle j’ai repris certains classiques de Hajine Kinoko. Son style particulier ne laisse personne indifférent.
En conséquence, nous avons ensuite été très sollicités pour faire découvrir les cordes. Parmi l’assistance, il y avait un couple auquel j’avais fait une initiation 3 ans auparavant. Après quelques discussions, nous avons décidé de réaliser une performance dans laquelle la femme serait attachée par Ingrid et moi. Un photographe et un vidéaste sont présents et nous nous mettons d’accord pour immortaliser le moment.
Nous nous avançons tous les trois vers le centre de la salle. La modèle est un peu tendue, ce qui est normal puisqu’il s’agit que de la 3eme fois qu’elle est attachée dans sa vie. Et en public de surcroit!
Après un petit moment pour la rassurer, je commence par un Tengu, permettant ainsi à Ingrid de construire un harnais de bassin confortable…
Lacher prise pour mieux apprécier
Nous nous passons le relai dans les cordes. Nous jouons avec le ressenti de la modèle en alternant la douceur féminine et la fermeté masculine. Je la sens se détendre progressivement et même atteindre ce fameux lacher-prise.
A ce propos, les cordes peuvent être un plaisir mais aussi être angoissantes. lacher-prise correspond à l’état d’esprit dans lequel le modèle doit rentrer. Certaines disent qu’elle rentrent dans leur corps, d’autre qu’elles ne pensent à rien. Toutes racontent qu’elles ont l’impression d’être une poupée manipulées avec bienveillance par l’attacheur et de basculer ainsi dans une sorte de transe ou d’extase. Pour l’attacheur, il s’agit de modeler sa modèle.
L’attacheur est alors le pilote des ressentis de sa modèle. Il l’emmène dans un voyage de sensations avec un point culminant. Comme un guide de haute montagne en quelque sorte!
un abandon total
les figures peuvent alors s’enchainer les unes après les autres. Une chorégraphie spontanée nait de l’interaction entre les encordeurs et la modèle. Autant l’encordeur créé les figures, autant l’encordeuse accompagne la modèle et joue avec elle
Et comme tout guide, l’encordeur se doit de ramener son modèle à bon port. Le voyage de retour est aussi important que la montée en sensation. Dans le cas présent, le basculement dans la position dite « du pont » permettra une redescente en douceur.
une expérience quasi mystique
J’ai pour habitude de dire que le shibari s’arrête lorsque la dernière corde est totalement enlevée. C’est parfois au delà de ce dernier geste technique que les choses s’arrêtent réellement.
En l’occurrence, si le corps est revenu au sol, l’esprit lui continuait à vagabonder. Il a fallu plusieurs minutes à notre trio pour revenir sur Terre. Les connections étaient quasi palpables entre nous.
Nous venions de partager un grand moment…